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En lisant attentivement l’évangile, nous sommes frappés par le grand réalisme de Jésus.  Pour lui, le monde se compose d’un ensemble de gens différents, qui vivent en confrontation.  Jésus ne dit pas « n’ayez pas d’ennemis« , mais vous avez des ennemis, alors aimez-les,  priez pour eux.  Sa parole nous touche d’autant plus qu’elle concerne bien la réalité de notre vie.

Comment gérer nos conflits?  Comment vivre la réalité de la différence et de la confrontation avec autrui?  Voilà quelques questions auxquelles la liturgie donne une ébauche de réponse dans les textes de ce jour.  Elle nous propose plusieurs pistes pour la gestion de nos conflits.

1. La liberté dans nos actes:

Le livre de Samuel nous raconte l’épisode où David épargne Saül livré entre ses mains.  Quelle liberté faut-il à David pour agir contre la volonté de ses amis qui l’encouragent à profiter de l’occasion pour tuer Saül!  Nous savons tous la difficulté qui nous incombent d’agir contre la détermination d’un groupe.  Imaginez la tête des amis de David quand celui-ci décide de partir en laissant son persécuteur libre !

L’amour de Dieu qui comble le cœur de David le rend libre en face de tous ceux qui l’entourent, mais aussi devant Dieu.  David est un homme libre, détaché d’une logique purement humaine de pouvoir et de concurrence.  Il reste concentré sur la justice et la fidélité de Dieu.  Si la mort avait été donnée à Saül, les deux hommes n’auraient-ils pas ensemble perdu leur liberté?  La mort enchaîne tandis que la vie libère.

La liberté qui habite David lui permet de reconnaître la présence de Dieu dans son adversaire (il est le oint de Yahvé).  Dieu, source de liberté pour chacun, le conduira à préférer la vie à la mort.

2. Une créativité féconde

La liberté entraîne une deuxième piste proposée par la liturgie de ce jour, il s’agit de la créativité.  Dans l’évangile, Jésus propose de tendre l’autre joue à celui qui nous frappe.  Nous sommes loin de la loi du talion (œil pour œil et dent pour dent) et encore plus loin du chant de Lamek qui proposait de se venger septante fois sept fois…

Jésus vient mettre un frein à la violence qui monte en l’homme en lui proposant un geste nouveau, inédit: un geste créateur d’amour.  Ainsi, au lieu d’entrer dans le jeu de son adversaire et de basculer inévitablement dans la spirale d’une violence infernale, Jésus nous exhorte à la créativité.  Il le fait en nous encourageant à conclure nos conflits dans un geste efficace, positif et non-violent.  L’amour, je pense,  nous pousse à la créativité.

3. La réconciliation

La liberté et la créativité risqueraient d’être réduites à de petites recettes superficielles si elles n’étaient évangélisées. Nous avons déjà vu comment Dieu s’intégrait dans ces perspectives avec David ou Jésus.  Si Dieu, en effet, était absent de ces démarches, la polémique risquerait de n’être apaisée que pour un temps.  Nos fragilités ne nous permettent pas de résoudre nous-mêmes le conflit en profondeur.  Le recours à Dieu s’impose.  Pour lui, la seule issue véritable et durable au conflit réside dans la réconciliation.  La réconciliation avec la sœur, le frère est étroitement liée à la réconciliation avec Dieu.  Car si le frère ou la soeur est blessé, Dieu souffre aussi.  L’abandon à l’autre de nos sécurités, de notre vie nous permet d’entrer dans une dynamique d’amour à la mesure de Dieu.

L’enracinement dans l’amour de Dieu, voilà le seul lieu à partir duquel nous pouvons être libres, créatifs et surtout capables de poser des gestes de réconciliation.

Frère Pierre Gabriel

Lectures: Jr 17, 5-8 ; 1 Co 15, 12.16-20 ; Lc 6, 17.20-26

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