Un modèle de prière
« J’aimerais bien prier, mais je ne sais pas comment » me demandait un jeune il y a quelques années. La liturgie de ce dimanche pourrait lui proposer quelques pistes pour répondre à ce désir, qu’on peut déjà considérer comme un mouvement de l’Esprit Saint.
En premier lieu, pour Jésus, la prière est un acte naturel. Les évangiles nous le montrent souvent en train de prier, seul à l’écart ou dans la synagogue, face à un malade ou avec ses disciples. Le chapitre 17 de St Jean particulièrement fait écho à la grande prière du Christ lors de son dernier repas : un moment fort à la veille de sa passion. L’heure est venue : glorifie ton Fils afin que le Fils te glorifie…La vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent toi le seul vrai Dieu. Cette prière rejoint celle du Notre Père : que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne…
Prier, à la suite de Jésus, c’est d’abord regarder vers Dieu, et le regarder comme un Père plein de bonté. Et puis, comme disait un jeune à Taizé, c’est « regarder Dieu me regarder ». J’ai manifesté ton nom aux hommes que tu m’as donnés…Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel…
Ensuite, regarder les autres et se tourner vers Dieu avec eux. Je prie pour ceux que tu m’as donnés…eux ils sont dans le monde… C’est la prière en communauté. A l’image de la toute première communauté chrétienne, celle qui s’est formée autour des Apôtres. Le Livre des Actes prend la peine de les citer tous par leur nom et il ajoute : tous d’un même cœur étaient assidus à la prière, avec des femmes, avec Marie la mère de Jésus, et avec ses frères. C’est un groupe diversifié – apôtres, femmes, mère et frères de Jésus -, qui donnera naissance à d’autres communautés variées telles que pourra le constater un fonctionnaire de l’Empire romain vers la fin du premier siècle. Pline le Jeune, gouverneur en Asie mineure, écrit à l’empereur Trajan pour demander comment il doit se comporter vis-à-vis des chrétiens : « ils affirmaient que toute leur faute ou leur erreur s’était bornée à avoir l’habitude de se réunir à jour fixe avant le lever du soleil, de chanter entre eux un hymne au Christ comme à un dieu, de s’engager par serment à ne pas commettre ni vol ni brigandage ni adultère, à ne pas manquer à la parole donnée, etc ».
Se réunir à jour fixe et chanter une hymne au Christ : inutile d’insister auprès de vous sur l’importance de la messe dominicale. C’est le pilier central de la communauté chrétienne. Mais ce n’est pas le seul. Ils ont gardé ta parole, dit encore Jésus dans sa prière, car je leur ai donné les paroles que tu m’avais données, ils les ont reçues, ils ont vraiment reconnu que je suis sorti de toi et ils ont cru que tu m’as envoyé. Recevoir les paroles de Jésus et les garder – ce qui signifie non pas les enfermer quelque part mais les garder dans son cœur et en prendre acte dans la vie comme de précieuses lignes de conduite et comme étant la parole même de Dieu : voilà encore un chemin privilégié de la prière. Heureusement, il ne manque pas aujourd’hui de lieux où l’on pratique la lectio divina, la lecture priante de la Bible : dans les monastères bien sûr, mais aussi dans des groupes de chrétiens ordinaires qui trouvent dans le partage de la Parole une solide nourriture spirituelle.
Enfin, pour nous limiter aux lectures de ce jour, la lettre de Pierre nous ouvre encore un autre aspect de la prière : dans la mesure où vous communiez aux souffrances du Christ, écrit-il en évoquant les persécutions, et encore : si l’on vous insulte pour le nom du Christ. Notre prière ne peut pas ignorer tous ceux et celles qui ‘communient aux souffrances du Christ’ de multiples manières, ni les chrétiens qui sont insultés ou persécutés à cause de leur foi. Et Pierre ajoute : si quelqu’un souffre comme chrétien, qu’il n’ait pas de honte et qu’il rende gloire à Dieu. N’ayons pas honte d’être chrétiens, réjouissons-nous et rendons gloire à Dieu : c’est bien ce que nous faisons dans cette eucharistie.
Abbé René Rouschop
Lectures de la messe:
Ac 1, 12-14
Ps 26 (27), 1, 4, 7-8
1 P 4, 13-16
Jn 17, 1b-11a