À une époque, le peuple d’Israël s’est cru puissant et plaçait sa confiance dans ses biens. Face à pareille situation, Isaïe dénonça cette fausse sécurité: «Malheur à ceux qui ajoutent maison à maison, champ à champ» (Is 5, 8). Par contre, durant l’exil à Babylone, quand le peuple désespérait de Dieu, Isaïe et ses disciples habités par une folle espérance l’encouragèrent à ne pas perdre courage, à continuer de mettre sa confiance en Dieu. Les priants pour la paix en Ukraine ou ceux qui sur place ou de loin s’impliquent pour maintenir ou créer du lien s’enracinent dans ce courant parfois appelé idéaliste.
A la fin de l’exil, Cyrus, sensible aux peuples de son empire, envisage le retour d’Israël sur sa terre. Mais la majorité du peuple doute de la promesse de Dieu, de leur retour chez eux. Fidèle à la foi de son maître, un prophète disciple d’Isaïe, sollicite la mémoire du peuple. Le Dieu qui dans le passé a été aux origines du monde, qui fit la pluie et la neige et qui suscita un peuple ne pourrait-il pas intervenir à nouveau ? Pour exprimer cela, ce prophète recourt à l’image du semeur et de la semence associés à la pluie et à le neige.» La pluie et la neige qui descendent du ciel n’y retournent pas sans avoir abreuvé. la terre, sans l’avoir fécondée et avoir fait germer la semence » (Is 55, 10-11). Semence jetée en terre, germant et produisant du fruit. Ainsi la parole qui sort de la bouche du Seigneur ne lui reviendra pas sans résultat, sans avoir accompli sa mission. Profession de foi du prophète en l’efficacité de la parole de Dieu dans le temps et l’espace. Parole efficace hier mais aussi aujourd’hui. Lors d’un échange avec un ami, nous avons rapproché cette façon de procéder du prophète à celle adoptée par le président Zelensky. Lui aussi rappela et rappelle à plusieurs reprises l’exploit réalisé dans la passé par le peuple Ukrainien soumis à une famine imposée par des dirigeants russes. Procédé utilisé hier par les prophètes et auquel recourent encore des dirigeants politiques d’aujourd’hui pour encourager la résilience de leur peuple.
Notons que si la parole de Dieu a été efficace pour Israël, il a fallu que le peuple contribue activement à sa délivrance en renonçant à des postes bien rémunérés, en se convertissant. Que le méchant abandonne sa conduite mauvaise, que le criminel renonce à ses pensées, que tous reviennent à Dieu riche en pardon. En réalité, un petit reste y répondit.
L’Évangile de ce jour abonde dans le même sens. Il est aussi question d’un semeur sorti pour semer. Notez qu’au début de l’Évangile, à l’instar du semeur Jésus sort et se met à enseigner! Le semeur ici c’est Jésus, la terre c’est nous aujourd’hui, les grains semés c’est la Parole de Dieu. Jésus insiste: les grains (la Parole ) sont jetés généreusement partout alors que les terrains, ses auditeurs sont diversifiés. Il y a des terres pierreuses et sèches, des terres sans profondeur, des terres envahies par les ronces et enfin des terres bien préparées et accueillant la bonne nouvelle, la Parole incarnée qu’est Jésus! La Bonne Nouvelle c’est que Dieu ne cesse de semer sans compter dans l’espoir que les terres que nous sommes portent un jour beaucoup de fruits. Parmi ces terres, où nous situons-nous? Laissons-nous la Parole du Christ rejoindre toutes le zones qui nous constituent ? S’enraciner dans nos joies, nos talents, nos doutes, nos peines, nos lieux de fragilités, de blessures, nos handicaps… afin que sa lumière en jaillisse.
Saint Paul d’ajouter que les humains comme tout le cosmos crient toute leur souffrance. Ils vivent une communauté de destin. Mais il a l’intime conviction que les temps sont venus où l’humanité et le cosmos si longtemps solidaires dans le malheur s’achemineront ensemble à travers les douleurs d’un enfantement vers la liberté retrouvée. Libération de l’esclavage de la dégradation pour le cosmos et liberté suscitée en nous par le don de l’Esprit Saint. Osons partager cette conviction de Paul et contribuer à sa réalisation.
Fr. Jean-Albert Dumoulin
Lectures du jour
Is 55, 10-11
Ps 64 (65), 10abcd, 10e-11, 12-13, 14
Rm 8, 18-23
Mt 13, 1-23