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Très tôt, beaucoup se sont dit : les apôtres ont eu la chance, eux, de voir et de toucher Jésus ressuscité. Mais nous, nous ne l’avons pas vu. L’évangile d’aujourd’hui répond à cette objection avec l’histoire de Thomas, celui qu’on appelle Didyme, ce qui signifie « jumeau ». Il porte bien son nom, tant il est vrai qu’il nous ressemble, qu’il est notre jumeau. Comme l’apôtre Thomas, nous sommes sceptiques et incrédules. Nous aussi nous avons besoin de vérifier, de constater, d’avoir des preuves. Que Jésus soit ressuscité constitue une nouvelle tellement inouïe qu’on ne peut le croire. C’est impossible. Il ne faut pas me raconter des histoires, pense Thomas. Et nous pouvons nous imaginer les autres apôtres essayant de le convaincre. Mais, les jours passent et Thomas ne change pas d’avis. Le Ressuscité peut traverser les murs, il ne peut pénétrer dans un cœur qui se ferme. La présence divine s’arrête au seuil de notre liberté. Aussi, nous ne devons pas être surpris quand nous n’arrivons pas à convaincre autour de nous ceux qui ne croient pas que Jésus est ressuscité.

Le temps passe et Thomas ne change pas d’opinion. Alors que faire ? Et nous, comment pouvons-nous arriver à croire ? Nous n’allons pas parvenir à croire en la Résurrection, en exigeant une apparition, un miracle, une preuve concrète et immédiate. Non, bien sûr ! Nous arriverons à croire en acceptant, comme Thomas, de faire la démarche de nous unir à la communauté des croyants, en acceptant de nous joindre à l’assemblée chrétienne, huit jours plus tard, c’est-à-dire le dimanche.

Huit jours plus tard, les onze apôtres étaient de nouveau réunis. Nous apprenons là une chose importante : dès le début, l’Eglise primitive, les disciples de Jésus prirent l’habitude de se réunir le premier jour de la semaine, le dimanche. Comme nous ce matin ! Cela nous montre comment faire l’expérience de la présence de Jésus-Christ ressuscité. La vision du Ressuscité n’est pas un privilège individuel réservé à quelques-uns. Le moyen normal d’avoir accès au mystère pascal, la manière habituelle de voir le Christ ressuscité c’est de nous réunir humblement avec la communauté chrétienne, avec l’assemblée des croyants. Dans la première lecture, il nous est dit que beaucoup adhéraient au Seigneur, non pas parce qu’ils voyaient des miracles, mais parce qu’ils découvraient une communauté qui n’avait qu’une seule âme et un seul cœur.

La foi chrétienne n’est pas une affaire privée et intime qui se vit chacun de son côté, mais une réalité ecclésiale. Il s’agit de reconnaître la présence de Jésus vivant, présent au milieu de ceux et celles qui se réunissent en son nom, dans un même lieu, au rythme au moins de chaque dimanche. Célébrant l’eucharistie, nous sommes réunis au nom de Jésus pour l’accueillir dans sa Passion offerte pour nous : « ceci est mon corps, ceci est mon sang ». Jésus se présente à nous avec ses plaies parce que la résurrection n’annule pas la mort, mais la traverse. De même la paix du Ressuscité n’oublie pas la souffrance de la Passion, mais c’est une paix au-delà de l’épreuve et de la souffrance.

Lors de notre assemblée eucharistique, nous recevons comme les apôtres la paix du Seigneur et nous devrions être remplis de joie. De même aussi, l’Esprit Saint souffle sur nous pour chasser nos peurs et pour que nous ayons l’audace d’annoncer par notre vie la bonne nouvelle de Pâques. Ainsi, fortifiés et encouragés, le dimanche, par cette rencontre avec le Christ et avec nos frères et sœurs dans la foi, nous pouvons retrouver avec une espérance renouvelée, le quotidien de la semaine avec ses engagements.

Comme l’écrit le pape François dans sa Lettre Apostolique sur la formation liturgique :  « De dimanche en dimanche, la parole du Seigneur ressuscité illumine notre existence. De dimanche en dimanche, la communion au Corps et au Sang du Christ veut faire de notre vie un sacrifice agréable au Père, dans la communion fraternelle du partage, de l’hospitalité, du service. De dimanche en dimanche, l’énergie du Pain rompu nous soutient dans l’annonce de l’Evangile. Tout cela sous le regard de Marie. (N°65) ».

Thomas est notre jumeau parce que l’expérience qu’il fit, c’est-à-dire celle d’une communauté réunie au nom de Jésus, partageant la paix et la joie, recevant l’Esprit-Saint, faisant l’expérience de la miséricorde, touchant le corps de Jésus, caché sous le voile des signes sacramentels, toute cette expérience qu’il a faite, nous pouvons la faire en chaque eucharistie.

Cependant, il ne faut pas oublier de souligner une chose importante. C’est en mettant ses mains dans les plaies de Jésus que Thomas s’est exclamé : « Mon Seigneur et mon Dieu » ! Puissions-nous reconnaître aussi la présence de Jésus dans les membres souffrants de nos communautés, puissions-nous reconnaître sa présence dans les blessés de la vie !

Que chaque dimanche, frères et sœurs, puisse être ce puits spirituel où nous venons puiser la force d’être disciples du Ressuscité ! Pour les premiers chrétiens, la messe du dimanche n’avait rien d’une obligation ennuyeuse, elle était la lumière qui illuminait toute la semaine.

Pensons à ces 49 martyrs chrétiens arrêtés sous Dioclétien en l’année 304 parce qu’ils se réunissaient pour célébrer l’eucharistie, malgré l’interdiction de l’empereur. Conduits à Carthage devant le proconsul, ils confessèrent avec force : « Sans le dimanche, sans la Pâques dominicale, nous ne pouvons pas vivre ».

Le message de l’apôtre Thomas peut se résumer ainsi : ne demandez pas à voir le Ressuscité. Vivez de telle manière que, pour tous les incrédules, il devienne visible que le Christ est vivant au milieu de vous et qu’il donne sens à votre vie.

Fr. Bernard de Briey

Lectures de la messe :
Ac 4, 32-35
Ps 117 (118), 2-4, 16ab-18, 22-24
1 Jn 5, 1-6
Jn 20, 19-3

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