Je commencerais par vous redire à chacun et à chacune ainsi qu’à celles et àceux qui nous écoutent : bonne année. Chaque premier janvier, nous faisons circuler des souhaits entre nous. Pourquoi ces souhaits ? Que cache cette formule banale « bonne année » ?
Par ces souhaits, sans doute, nous souhaitons justement dire du bien, laisser de la place au bien au lieu de dire du mal ou penser du mal. Comme si nous souhaitions laisser sa chance au bien, là où cela dépend de nous. Une manière de nous raccrocher à l’espérance sans laquelle nous déclinons, sans quoi nous perdons pied. Nous sommes alors comme un sapin le 30 janvier …
J’ai envie de dire aussi que l’Évangile comme Bonne Nouvelle nous appelle à revenir au commencement, au 1er janvier de nos vies. Lorsqu’on lit les récits évangéliques, n’est-ce pas ce qui est dit de Jésus avec les gens qu’il croise sur sa route. « Va, ta foi t’a sauvé », dit-il souvent. Reviens à la source de la vie, à ce qui peut la commencer, la recommencer à nouveau. Laisse Dieu être Dieu en toi, celui qui peut y remettre de la nouveauté, de l’ouverture, de l’espace. Il t’invite à défaire les liens qui te retiennent, qui te fixent pour aller à nouveau. Sans cesse nous disons à quelqu’un que nous rencontrons : comment vas-tu ? Parce qu’il s’agit justement d’aller encore. Non pas d’avoir la bougeotte mais la capacité et le courage d’avancer au lieu de tourner en rond, de répéter. Quand Jésus dit qu’il est la voie, il ne veut pas nous mettre en main la carte routière de notre vie ; il nous dit que toute vie qui s’inspire de lui est une voie, un chemin, fait pour trouver de quoi être en route, en marche et porter du fruit. Un chemin et non une impasse. L’autre jour, je me suis retrouvé devant la parabole que l’on appelle souvent la parabole du bon samaritain. Est-ce que cette histoire nous est racontée pour nous dire : soyez secourable, arrêtez-vous sur la route… ? Peut-être qu’elle nous dit cela mais alors on aurait envie de reprendre l’interrogation des disciples qui demandent à Jésus : pourquoi parles-tu en paraboles ? Et, en effet, pour dire qu’il convient de porter secours à autrui faut-il toute une parabole ? Jésus voudrait-il appeler notre attention sur ce qui se passe avec ce geste du samaritain auprès du blessé ? Ce qui se passe ne serait-il pas que son geste crée du commencement, ouvre du commencement. Il fait naître quelque chose d’inattendu, de non programmé. C’est sans justification, même si on peut apporter mille explications et motivations à ce qu’il fait. Ce commencement n’est écrit nulle part. Il n’est écrit nulle part que ce samaritain doit agir comme il le fait. Son commencement est une innovation, une invention. Il improvise hors des codes et du « c’est écrit ». Serait-ce cela l’Évangile ?
J’aime penser aussi que Marie que nous fêtons aujourd’hui le 1er janvier est là bien à sa place. C’est la femme du commencement. Par son « oui » risqué au commencement, elle porte dans la chair de l’humanité une nouveauté inattendue qui peut surprendre, renouveler la vie, recommencer du neuf. Je la vois comme les femmes de la résurrection, celles qui viennent au tombeau portant des aromates mais qui se retrouvent devant un tombeau vide. Elles seront les premières à être visitées par le Christ ressuscité. Ce sont des femmes du commencement. Les premières à porter plus loin la Bonne Nouvelle. Elles sont là pour que l’Évangile ne s’arrête pas, qu’il continue.
Fr. Hubert Thomas
Lectures de la messe :
Nb 6, 22-27
Ps 66 (67), 2-3, 5, 6.8
Ga 4, 4-7
Lc 2, 16-21