« Une autorité libératrice » (Mc 10, 35-45)
Aujourd’hui, à nouveau Jésus dérange nos schémas humains. Sous la confusion de Jacques et Jean nous arrivent à travers le temps ces paroles qui sont toujours d’actualité : « Le Fils de l’homme est venu donner sa vie en rançon pour la multitude ». (Mc10, 45)
Le terme de rançon est sans doute difficile à comprendre. Il pourrait renvoyer à un élément financier ou à un don gratuit. Je ne pense pas que Jésus vas nous faire une leçon d’argent. Il va plutôt nous parler du royaume de Dieu et de la libération de nos chaînes. En fait, il y a bien dans le texte de Marc l’idée de libération, une libération des liens d’esclavage et d’oppression.
Déjà au IVème s. avant Jésus Christ, le prophète Isaïe annonçait « Broyé par la souffrance, le serviteur a plu au Seigneur » (Is 53, 10-11). Rappelons-nous que dans l’Ancien Testament de manière générale, Dieu appelle serviteurs ceux qu’il choisit pour collaborer à son dessein : Moïse, David, les patriarches, les prophètes. Tous ont en commun une attitude morale fondamentale, faite d’obéissance à la volonté divine, de fidélité et d’amour.
Soyons certains que 400 ans avant Jésus Christ, Isaïe ne parlait pas encore de Jésus de Nazareth. Imaginons un instant un prédicateur qui parlerait pour l’an 2400 ; il n’aurait guerre d’auditeurs ! Un prophète n’est pas un clairvoyant mais un homme qui a la grâce et une sagesse : c’est un porte-parole de Dieu pour ses contemporains.
Quelles sont alors les circonstances dans lesquelles Isaïe adresse cette parole ? Dans la tourmente de l’Exil à Babylone, un petit nombre de croyants tente de garder la foi et de rester fidèle à la religion de leurs pères. A ce petit ‘reste’, comme on le nommait à l’époque(1), Isaïe donne des raisons de continuer à espérer et il demande une véritable conversion qui sera le point de départ pour un monde meilleur. Son message est double : 1) Dieu vous est fidèle et 2) vous avez un rôle à jouer.
« Un monde meilleur » annoncé par le prophète Isaïe se prolonge chez l’évangéliste Marc par l’annonce du « royaume des hommes », qui deviendra plus tard le « royaume de Dieu ».
Plein de grâce, le Seigneur réunit ses disciples pour leur faire comprendre l’amour qu’il a pour eux. Tandis que Jacques et Jean craignent les paroles de Jésus ; celui-ci les met en confiance. Ils espèrent un bonheur qui leur est bel et bien promis : siéger avec le Christ, dans son intimité. Ce qu’ils ne savent pas encore, c’est qu’ils siégeront bientôt avec lui, lors de son dernier repas et qu’ils accéderont à sa gloire et à son intimité par la croix, la mort et la résurrection.
Rappelons-nous les paroles du Seigneur : « Celui qui veut devenir grand sera votre serviteur. Celui qui veut être le premier sera l’esclave de tous ». (Mt 20, 27 et Mt 23, 11). Voilà qui est interpellant et déplace nos schémas de pensée : celui qui veut être grand doit se mettre à la dernière place et servir. Dans une société cela ne veut pas dire de mal gérer l’entreprise mais la diriger de façon à tenir compte des ouvriers, être à leur écoute et leur donner une orientation ainsi qu’agir dans le respect de la dignité humaine afin d’avancer ensemble.
Comme disciples, nous aussi, je vous propose de retenir trois attitudes :
1. l’attitude de la confiance : Prions avec Isaïe qui nous met dans la confiance que le Seigneur nous soit fidèle pour toujours.
2. l’attitude aimante comme le Psalmiste nous chante : « Que ton amour, Seigneur, soit sur nous comme notre espoir est en toi ! » (Ps 32, 22)
3. l’attitude de serviteur : Marc nous rappelle que nous devons rendre service aux autres.
Avec ces attitudes de la confiance priante, de l’amour et de notre engagement comme serviteur nous pouvons avancer c’est -à -dire continuer à croire même quand c’est difficile car comme la croix nous fait vivre, la foi nous encourage à persévérer.
Amen.
(1) Cfr. Miché 4, 7 et Tobie.
Soeur Julian
Lectures: Is 53, 10-11 ; He 4, 14-16 ; Mc 10, 35-45