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L’intrigue est simple : un homme gagne au Lotto et refuse l’argent car il n’avait « simplement pas envie d’être quelqu’un au milieu de tout ce qu’il se serait acheté ».

L’intrigue est simple et peut-être dit-elle quelque chose du monde où nous sommes.

On peut alors imaginer que dans ce monde quelqu’un se pose la question : mais quel est le sens de la vie ? Et supposons qu’il vienne poser cette question à Jésus, comment ce dernier répondrait-il ?

Je suis frappé en tout cas par ce que Jésus dit au départ à cet homme qui vient le trouver : « pourquoi m’appelles-tu bon ? Un seul est bon, c’est Dieu ». Comme s’il voulait mettre un écart, un double écart : qu’attends-tu de moi ? Et qu’est-ce que tu demandes ?

Peut-être cet homme demande-t-il une bonne réponse, les bonnes réponses sur le sens de la vie. Et qu’il n’ait plus à se prendre la tête, à se questionner, se poser des questions, lire des livres de philosophie, etc. Mais n’est-ce pas une illusion de croire que le sens de la vie on peut l’obtenir, on peut l’avoir ? Enfin ! En y mettant le prix, avec de l’argent, avec des efforts.

Ce que Jésus propose à cet homme c’est une sorte de désencombrement, un passage par le vide. En le renvoyant à Dieu qui seul est bon, Jésus le renvoie non à un plein de réponses mais à un vide. Il s’agit de se délier, se désencombrer, se détacher. Non pas dans un esprit de sacrifice mais pour se rendre libre, plus libre.

Le vide n’est donc pas un rien, c’est un vide qui fait bouger, déplacer, se délier, qui remet du jeu. Le récit nous apprend que ce qui retient cet homme c’est qu’il a « de grands biens ». Cela le rend triste, nous dit-on, d’une tristesse encombrante, lourde, un lourd fardeau.

Et Jésus recourt à une image parlante : celle du chameau qui doit passer par un trou d’aiguille. Quand un chameau bien chargé veut passer par le trou d’une aiguille, il n’y arrive pas. Ce que Jésus veut mettre en lumière c’est qu’on n’y arrive pas par ses propres efforts en suivant les commandements, les règles de vie, les méthodes de développement personnel. Un autre esprit est nécessaire, un changement. C’est à accueillir, à recevoir. Mais cet homme retourne à ses biens, il retourne à sa sécurité et n’entre pas dans la nouveauté. C’est comme si cet évangile nous posait la question : à quoi demander la transformation ? A l’argent ? Nietzsche l’a bien vu, nous ressemblons souvent à ces chameaux, chargés de devoirs, soumis et adaptés. Mais là n’est pas la vie, la vraie vie…Nous aurons beau nous rebeller et tout casser, nous ne serons alors pas autre chose que des lions vociférants. Quand deviendrons-nous des enfants ? C’est, pour Nietzsche la 3ème métamorphose, la 3ème transformation ou passage. Et ce n’est pas pour

rien que dans ce discours de Jésus où se trouve l’évangile d’aujourd’hui, nous découvrons la parabole de l’enfant: « qui n’accueillera pas le Royaume de Dieu comme un enfant n’y entrera pas » (Mc 1O, 15)

Ce récit évangélique ne pose pas de jugement moral. Il ne se place pas au plan moral : comment faire avec l’argent, comment le répartir, le partager. Il ouvre un questionnement. Ce que nous appelons les biens, l’argent, risquent de ramener la vie au calcul, la ramener au niveau des comptes. J’aime bien cette différence : une vie au niveau des comptes ou une vie à raconter ? Lors d’une enquête faite dans une institution de soins palliatifs, on a remarqué que l’argent, les comptes, ce n’est pas ce dont on se souvient spécialement dans une vie. A la fin…

Fr. Hubert

(hubthomaswav@live.be)

Lectures: Sg 7, 7-11 ; He 4, 12-13 ; Mc 10, 17-30

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