Pour commencer, j’aimerais introduire notre thématique d’aujourd’hui, c’est-à-dire « l’idée du cheminement », avec un récit personnel.
Autrefois, je travaillais dans un bureau à Bruxelles situé entre les stations de métro Malbeek et Arts-Lois. La station Malbeek est malheureusement connue par les attentats du 22 mars 2016. La station Arts-Lois quant à elle se situe au croisement des lignes de métro 1 et 2 qui traversent la ville.
Habituellement, je prenais le métro vers 8h du matin et il y avait une foule de personnes de toutes origines qui se côtoyaient pour se rendre également au boulot. Des personnes à la démarche agitée, déterminée, assurée, avançaient machinalement, chacun ignorant l’autre, plongé dans sa journée, marchant vers sa destinée.
Des années plus tard, je repassais à la même station de métro Arts-Lois mais cette fois-ci à un autre moment de la journée vers 10-11 heures du matin. .. et la scène avait complètement changé. Il y avait du silence, au moins un petit peu, et je croisais seulement quelques personnes, moins pressées, moins stressées et aussi moins déterminées, certaines dormant même sur le quai.
Le contraste était saisissant. Je me suis arrêtée pour regarder autour de moi et puis comme j’avais un peu de temps, je me suis mise en route, décidée à prendre le métro dans la direction opposée et inhabituelle pour moi, je voulais emprunter un autre sentier… pour éventuellement rencontrer l’un ou l’autre proche sur ma route, des personnes qui n’avaient pas de destination précise, qui n’avaient pas un boulot rémunéré et peut-être pas de famille pour les accueillir. Je me suis tout simplement laissé guider par l’Esprit qui m’entraînait toujours plus loin, encore et encore.
Sur ce chemin, j’ai rencontré des personnes comparables à Jean Baptiste qui annonce et proclame la venue d’un Sauveur. Au départ de cette rencontre, j’ai été bien sûr un peu sceptique, même effrayée. J’avais décidé de ne pas me laisser abuser par des ‘belles’ paroles. Mais comme j’avais compris que je devais me laisser inspirer au point d’oser, pour une fois, changer de route … voilà, je me laissais saisir et je m’abandonnais dans cette nouvelle expérience.
En effet, le rôle du Baptiste c’est d’ouvrir la voie à Jésus, de Lui préparer le terrain. (Mc 1, 14-15, Mt 4, 12-17). « Voici venir derrière moi Celui qui est plus fort que moi » (Mc 1, 7). Ce n’est certes que progressivement que l’image du prophète de la conversion fait place à l’image du Messie. Tout se passe comme s’il fallait débuter par cette figure familière du Précurseur pour pouvoir rendre compréhensible la venue du Fils de Dieu.
Pratiquement, je pense que la question du chemin (l’idée du cheminement), se confond avec le Christ lui-même qui vient éprouver avec nous l’amertume des pauvretés humaines. Et c’est à cela que les textes d’aujourd’hui nous invitent : à prendre conscience de nos réalité ici et maintenant, jusqu’à se donner la liberté d’emprunter un nouveau chemin de douceur et d’amour, de nous laisser inspirer et de changer de cap, confiant en notre Seigneur.
Demander son chemin, n’est-ce pas aussi la question essentielle que se pose l’âme du pécheur souhaitant emprunter un chemin de repentir et de conversion, comme celui enseigné par Jean Baptise. Ne serait-ce pas également l’une des façons dont les gens qui nous entourent seront amenés à glorifier Dieu ? C’est en voyant notre changement, notre écoute, notre accueil, notre constance, notre fidélité, notre maintien dans la lumière qu’ils verront, peut-être, en nous des gardiens et des témoins de la foi.
Chers frères et sœurs, le temps de l’Avent annonce déjà la fête de Noël qui marquera le moment où la durée de nos journées va recommencer à augmenter. Alors, laissons-nous guider, nous aussi, de l’Obscurité vers cette Lumière. Partageons le corps du Christ. Préparons-nous à vivre une vie de nouveau-né. Nous qui buvons à sa coupe, apportons la vie aux autres ; nous qui demandons que l’Esprit nous éclaire, faisons confiance à la Providence et empruntons de nouveaux chemins : les sentiers du Seigneur !
Amen.
Soeur Julian Day
Lectures de la messe :
Is 40, 1-5.9-11
Ps 84 (85), 9ab.10, 11-12, 13-14
2 P 3, 8-14
Mc 1, 1-8