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Que peut-on faire ?

Nous arrivons à la fin de l’envoi des disciples par Jésus. Après l’appel des douze, il annonce le monde nouveau qu’ils vont servir : le règne de Dieu se fait tout proche des hommes. Pour cela, comme Jésus, ils devront lutter contre le mal sous toutes ses formes. Ils vont donc rencontrer de l’opposition et des persécutions, mais ils ne doivent pas craindre ceux qui peuvent tuer le corps et ne peuvent tuer l’âme (dimanche dernier). On arrive dès lors logiquement aux paroles que nous venons d’entendre : les disciples doivent être prêts à porter le poids de cette mission, celui qui ne prend pas sa croix n’est pas digne de moi.

La croix ou le poids de la mission n’est pas seulement le rejet ou la persécution, ce peut être simplement la situation du monde. Ainsi pouvait-on lire dans le journal mardi dernier : « Le secteur de l’aide à la jeunesse est en crise…Il y a de plus en plus d’enfants dans le besoin, les demandes ont doublé depuis 2020. Pourquoi ? Grande question… La société va de plus en plus mal : dépendance des parents, de la négligence, un problème psychiatrique, de la pauvreté sociale… » (fin de citation). Je laisse la responsabilité de cet avis à l’association qui l’exprimait. Quoi qu’il en soit, ce point de vue confirme l’impression que les besoins d’accueil dans notre société ne concernent pas seulement les réfugiés qui fuient la misère ou la guerre. La pauvreté, l’isolement et la dépendance ont aussi leur origine chez nous, et cela ne peut nous laisser indifférents. « Que peut-on faire pour cette femme ? », demandait le prophète Élisée à son serviteur, dans un autre genre de détresse, celle d’un couple sans enfant. C’est la première attitude que le Seigneur attend de nous : ne pas fermer les yeux sur la misère, et chercher comment pouvoir y répondre selon nos moyens. C’est notre responsabilité : être capable de répondre, selon nos possibilités, aux personnes que nous rencontrons, d’une manière ou d’une autre. Qui vous accueille m’accueille, dit Jésus à ses apôtres, et qui m’accueille accueille celui qui m’a envoyé. Plus tard, dans le même évangile selon St Matthieu au chapitre 25, il élargira cette sentence non seulement aux apôtres mais à tous ces proches qu’il appelle « les petits » : chaque fois que vous l’avez fait – ou pas fait – à l’un de ces plus petits, c’est à moi que vous l’avez fait.

Unis à Jésus

Telle est la raison d’être de l’hospitalité que le Christ attend de ses disciples : reconnaître en chaque être humain un frère ou une sœur de Jésus, une fille ou un fils de Dieu. Chacune et chacun avec sa spécificité propre. Accueillir un prophète en sa qualité de prophète – c’est probablement une allusion de Matthieu à l’histoire d’Élisée, que ses auditeurs juifs connaissaient bien -, accueillir un juste en sa qualité de juste, un disciple en sa qualité de disciple… on pourrait prolonger la liste : reconnaître en chacun sa qualité particulière d’enfant de Dieu. N’est-ce pas le message essentiel que le christianisme apporte au monde ? C’est avec raison que l’évangéliste situe ces paroles de Jésus, que nous venons de rappeler, en conclusion de son discours d’envoi des disciples en mission. Et c’est avec raison que St Benoît écrit dans sa règle : « tous les hôtes doivent être accueillis à leur arrivée comme s’ils étaient le Christ, car il a dit : ‘j’étais un étranger et vous m’avez accueilli’ ».

« Par le baptême qui nous unit à sa mort, nous avons été mis au tombeau avec le Christ pour que nous menions une vie nouvelle, nous aussi », écrit St Paul, en écho à l’évangile. Cette « vie nouvelle » a sa source en Christ et elle irrigue toutes nos relations, à commencer par les relations familiales, qui sont certes importantes mais dont il ne faut pas faire un absolu : celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi… etc. Des paroles apparemment dures, que Jésus appliquait d’abord à sa propre famille quand il disait : « ma mère et mes frères, ce sont ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui la mettent en pratique ».

Puisse notre attachement à la personne de Jésus et à sa parole être le guide et la raison de nos attitudes d’accueil, d’hospitalité et de gratuité les uns vis-à-vis des autres. C’est le meilleur remède pour guérir une ‘société qui va mal’ – même si ce diagnostic évoqué il y a quelques instants ne dit pas toute la réalité. Faisons nôtre cette prière du missel romain qui clôture la célébration de ce dimanche et qui, dans sa concision, dit bien l’essentiel : «ainsi reliés à toi par une charité qui ne passera jamais, nous porterons un fruit qui demeure pour toujours ». Ainsi soit-il.

Lectures de la messe :
2 R 4, 8-11, 14-16a
Ps 88 (89), 2-3, 16-17, 18-19
Rm 6, 3-4.8-11
Mt 10, 37-42

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