La foule cherche du pain pour se nourrir. Mais Jésus parle d’un autre pain, non d’un aliment qui est périssable mais d’un aliment qui procure la vie véritable. C’est pourquoi Jésus leur dit : « Ne travaillez pas pour la nourriture qui se perd, mais pour la nourriture qui se garde jusque dans la vie éternelle. » A ceux qui l’interrogent : mais alors comment se procurer ce pain-là ? Jésus répond que pour l’obtenir, l’unique travail c’est de croire en Celui qui a été envoyé par Dieu, la seule chose nécessaire c’est la foi en Jésus.
Dans l’évangile de Jean, croire ce n’est pas d’abord l’adhésion à une vérité mais l’adhésion à une personne qu’on écoute et qu’on suit. Ce pain merveilleux donné par Dieu et qui descend du ciel n’est plus un pain matériel, comme l’était la manne dans le désert, mais c’est une personne : « Je suis le pain de vie », dit Jésus. Et ce pain contient cette qualité extraordinaire d’offrir la vie en plénitude, un pain qui comble nos désirs.
Il y a cependant une condition, la seule, c’est la foi : croire en Celui que Dieu nous a envoyé. La foi c’est-à-dire la confiance absolue en Jésus. Cela signifie que la foi n’est pas un certificat qui se conserve dans une poche ou dans un tiroir. La foi c’est une manière de vivre, c’est une alliance, c’est une relation qui se renouvelle chaque jour.
Jésus, le premier, nous donne l’exemple de ce qu’est la foi. Même lorsque autour de lui tout est agité, menaçant, hostile, Jésus demeure en paix, maître de lui. Il domine chaque situation, grâce à une confiance inébranlable dans son Père. La foi de Jésus elle est dans son Père, c’est-à-dire dans un rapport de totale confiance et d’abandon en Celui qui l’aime infiniment. C’est cette même foi, que Jésus nous demande d’avoir à son égard.
De même que la manne ne pouvait se conserver et qu’on ne pouvait en faire de réserve, de même nous ne pouvons pas mettre la foi dans un coffre-fort. C’est une décision de chaque jour parce qu’il s’agit de suivre quelqu’un et de se laisser conduire par lui. Il s’agit de remettre notre vie entre les mains du Seigneur, et cela ne nous est jamais facile car c’est un risque.
Nous comprenons la réaction des Hébreux qui voulaient retourner en Égypte, préférant retrouver la condition d’esclave parce qu’au moins là ils étaient assurés d’avoir de la viande et du pain. Comme eux, nous sommes tentés de préférer la sécurité des biens matériels à l’insécurité de la Providence de Dieu, à l’insécurité de nous laisser conduire par l’Esprit de Jésus.
La foi est un trésor fragile. Elle peut être ébranlée par les circonstances de la vie, l’ambiance de la société qui nous entoure, les scandales dans l’Église, les épreuves de toute sorte. Pour la nourrir et pour la faire grandir nous avons besoin de l’appui d’une communauté et nous avons besoin du secours de la prière. On ne peut pas croire tout seul. Nous avons besoin d’un entourage qui soit porteur et qui nous donne envie de grandir dans l’unique foi, celle de notre baptême. Et puis la communauté nous aide à demeurer fidèle à la prière. Et c’est en priant que la foi s’enracine peu à peu dans notre cœur.
Ce matin, comme dans chaque eucharistie, Jésus actualise le don de sa vie et nous donne le pain véritable : « Prenez et mangez, ceci est mon corps livré pour vous ». Notre existence chrétienne, comme celle de Jésus, doit être vécue comme un don inspiré par l’amour, un engagement à servir nos frères et sœurs. C’est l’invitation à consacrer à Dieu tout ce que nous sommes, chaque rencontre, chaque projet.
L’exemple de Jésus nous révèle que ce qui fait la grandeur de l’être humain c’est sa capacité de se donner. Il nous enseigne que le sens de l’existence humaine, ce qui rend véritablement heureux c’est le don de soi-même, c’est que notre vie devienne pain pour les autres. Cela rejoint d’ailleurs notre expérience chaque fois que nous avons pu venir en aide à quelqu’un. C’est ce que nous pouvons voir ces jours-ci à la télévision sur le visage de beaucoup de bénévoles qui visiblement sont heureux d’avoir aidé ceux qui ont tout perdu dans les inondations. Jésus nous révèle que nous recevons la vie en plénitude, la vie éternelle qui ne périt pas, dans la mesure où nous l’offrons.
Il est vrai que notre générosité et nos capacités d’aimer ont des limites. Alors nous avons la grâce de pouvoir participer à l’eucharistie : la table de la parole et du pain, et de la fraternité. Elle est là pour renouveler notre foi et notre capacité d’aimer.
Fr. Bernard de Briey
Lectures de la messe :
Ex 16, 2-4.12-15
Ps 77 (78), 3.4ac, 23-24, 25.52a.54a
Ep 4, 17.20-24
Jn 6, 24-35