Que dites-vous après avoir dit bonjour ? Probablement : comment allez-vous ou comment vas-tu ? On veut aller, aller bien. Je vous souhaite d’aller bien …
Une des inventions les plus intéressantes de ces derniers temps est sans conteste l’invention du gps. Plus de problèmes en voiture, un guide sûr pour trouver son chemin : gardez votre droite, au rond-point, tournez à gauche. On a envie de dire : Génial !
Sur le pavement de la cathédrale de Chartres se trouve inscrit un labyrinthe. Plusieurs églises chrétiennes ont repris ce symbole du labyrinthe pour dire que si la vie de l’homme sur terre est un labyrinthe et même si celui-ci comporte des voies sans issue, des impasses, le labyrinthe comporte toujours une sortie. Le Christ ressuscité est notre chemin.
Ce sont là trois exemples qui mettent à découvert une des préoccupations fondamentales de tout humain : trouver son chemin, avancer, ne pas rester dans le sur-place.
Les mots de Jésus dans l’évangile de Jean : « Je suis le chemin, la vérité et la vie » sont alors comme la réponse à cette aspiration fondamentale. Cette affirmation de Jésus, veut-elle dire que le croyant aurait comme un gps à sa disposition, assuré d’être dans la vraie vie ?
Comment ne pas être sensible à cette proposition ? Chacun ne souhaite-il pas être sur le bon chemin, dans la bonne direction ? Et aussi être dans le vrai sans se raconter des histoires, se faire son cinéma. Quant à la vie, chacun souhaite être sinon un bon vivant (ce n’est pas donné à tout le monde) du moins être un vivant qui mord la vie à pleines dents. Est-ce trop beau pour être vrai ? De quoi méditer un peu ce dimanche.
« Je suis le chemin ». L’Évangile est chemin. Non pas dans le sens d’une carte à suivre, d’un gps donc. Il donne de quoi avancer, de quoi passer plus loin. Il dit : « ta foi t’a sauvé ». Tu peux. A toi de découvrir par toi-même ce qui fait avancer. Jésus n’impose pas, il dit : venez et voyez. Jésus montre une manière de vivre, le chemin où la vie trouve sa fécondité et son avenir.
« Je suis la vérité ». Mais la vérité, ce n’est pas une possession, une carte d’identité, une garantie, une maison clés sur portes. Encore une fois : « Venez et voyez », dit-il. Par vous-mêmes. Avoir la vérité, c’est du fanatisme. Dire : qu’est-ce que la vérité, du scepticisme. Comment percevoir que l’on est dans la vérité ? A chacun de voir mais les Ecritures parlent des fruits qui viennent, de la paix, de l’ouverture aux autres, ou encore le courage de vivre, l’espérance regagnée. La vérité, on n’en dispose pas, on ne l’a pas ; elle vient dans l’événement, dans ce qui arrive. Elle se livre dans la surprise et l’inattendu.
« Je suis la vie ». Le grand danger serait de croire que l’on peut la mettre dans des codes ou des règles de vie, même si cela n’est pas inutile. Jésus recourt à des métaphores. Il dit : c’est du vin nouveau, c’est de la levure, une perle fine que l’on mettra peut-être à son doigt ou à son cou, le parfum versé qui fait qu’on respire un autre air, la vie plus respirable…
Ce qui est vraiment étrange, c’est que ces mots de Jésus : « Je suis le chemin, la vérité, la vie » lui aient valu finalement le refus, la trahison, l’abandon, la croix. Etrange en effet. Pourquoi tant de haine ?
Mais voilà, le Christ dit en même temps qu’il est le chemin et que la porte est étroite. Il faudrait passer un chameau dans un trou d’aiguille, paraît-il. La vérité, on voudrait en disposer mais elle est à faire d’une heure à l’autre. Elle n’a pas d’heure fixe pour vous rencontrer. Rien n’est écrit d’avance. Quant à la vie, s’il y en a pour tout le monde, elle demande qu’on la relance toujours par-delà les codifications et les répartitions. Et Jésus pose à cet égard un signe qui résume tout : là où le pain est partagé entre les humains, l’avenir se livre. Serait-ce donc faux ? Est-ce insupportable ?
L’autre jour un médecin voulant sans doute attirer mon attention sur ma réalité : celle de quelqu’un qui rejoint franchement le nombre des gens d’âge. Oui, me dit-il, nous passons dans une société où les gens vont vivre plus âgés. Il se peut qu’un déséquilibre se fasse et que les générations en âge d’être au travail compensent trop peu le flot des retraités. C’est pourquoi, continuait-il, construire des murs, mettre des barbelés, refouler les réfugiés n’est sans doute pas l’avenir du monde. On peut dire : c’est une vision intéressée, calculatrice. Mais pourquoi voudrait-on ajouter encore de la cruauté à la cruauté ? Je sortis de chez lui en me disant : et si la préoccupation de Jésus ne tenait pas à une doctrine, des idées religieuses, confessionnelles. L’Évangile du pain rompu et partagé ne serait donc pas une pieuse histoire mais un chemin d’avenir pour la vie sur la planète. Comment faire en sorte que la vie gagne sur le long terme ?
Fr. Hubert Thomas
Lectures de la messe :
Ac 6, 1-7
Ps 32
1 P 2, 4-9
Jn 14, 1-12