ascension

Au cours d’un repas qu’il prenait avec eux, il leur donna l’ordre de ne pas quitter Jérusalem, mais d’y attendre que s’accomplisse la promesse du Père. C’était prudent. Pendant quelques mois, sans doute au moins deux années, il leur avait parlé du royaume de Dieu. En long, en large, en paraboles. Mais avaient-ils bien compris ?

Comme beaucoup d’autres, ils avaient décidé de faire cause commune avec lui, parce qu’ils espéraient  » que c’était lui qui allait délivrer Israël «  (Luc 24, 21), rétablir la royauté. Ses méthodes les avaient pourtant surpris : au lieu de chasser les soldats romains, il guérissait leurs esclaves ; il conseillait de payer l’impôt à l’occupant ; il trouvait que deux épées pour douze, ça suffisait ; et c’était bien assez, en effet, puisque, le moment venu, il n’avait pas voulu qu’on s’en serve. Alors, ils avaient décampé, on avait arrêté leur chef, on l’avait exécuté.

Le rêve de libération n’était pas mort pour autant. Mais il fallait imaginer un autre scénario, trouver un autre meneur. Et puis surprise, le revoilà, vivant. L’espoir renaît, tout est encore possible.

Depuis sa résurrection,  » pendant quarante jours, il leur est apparu et leur a parlé du royaume de Dieu « . Comme qui dirait une révision, un recyclage. Il pourrait estimer qu’ils sont prêts, maintenant, qu’il peut les envoyer, en faire des apôtres au vrai sens du terme. Mais il devine que s’ils partent tout de suite, ils vont encore dire des bêtises, et peut-être en faire. Ils n’ont pas revendu leurs épées :  » Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas rétablir le royaume pour Israël ? « 

Décidément, vous n’avez pas encore compris que je ne suis pas venu pour cela, vous n’êtes pas encore prêts pour la mission que je veux vous confier. Restez bien à Jérusalem et attendez encore un moment. D’ici peu de jours, vous recevrez l’Esprit Saint. Après cela, vous serez au point.  » Que le Père vous donne un Esprit de sagesse qui vous le révèle et vous le fasse vraiment connaître. «  Vous l’imaginez encore de travers.

L’Esprit qui nous est donné vient bousculer nos projets, brouiller nos stratégies, corriger nos analyses. Il s’agit de renoncer à la violence, sans pour autant renoncer à la force. Au contraire.  » Vous allez recevoir une force quand le Saint-Esprit viendra sur vous.  » Dans la lettre aux Éphésiens, Paul multiplie les mots qui décrivent ce don de l’Esprit, il y épuise son dictionnaire des synonymes :  » puissance incomparable, énergie, force, vigueur … «  Il est bien question de recevoir une force, mais pas pour écraser un ennemi, pas pour semer la mort dans les rangs de l’adversaire. Non, il s’agit plutôt de cette force que le Père  » a mise en œuvre dans le Christ quand il l’a ressuscité des morts «  : une force de vie et de réconciliation.

Quelques semaines auparavant, deux apôtres avaient proposé à Jésus de faire tomber le feu du ciel sur les Samaritains d’un village inhospitalier. C’étaient, comme de juste, ceux qu’il surnommait les fils du tonnerre, toujours prêts à foudroyer. Mais Jésus les avait remis à leur place. Certains manuscrits de l’évangile nous ont gardé le contenu de la remontrance : «  Vous ne savez pas de quel esprit vous êtes. Le Fils de l’homme n’est pas venu pour perdre les vies des hommes mais pour les sauver.  » Quand on entend les propos de certaines personnes qui se réclament de la foi chrétienne, on peut se demander si elles savent de quel Esprit elles sont. Savons-nous bien nous-mêmes de quel Esprit nous sommes ? Il nous reste dix jours pour demander à l’Esprit de Pentecôte de venir nous ajuster, et nous serons témoins de la force de vie qu’il a mise en nous, la force invincible de son infinie douceur.

Fr. François Dehotte

Lectures de la messe :
Ac 1, 1-11
Ps 46
Ep 1, 17-23
Mt 28, 16-20

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