En écoutant les premiers mots de la lecture tirée du prophète Isaïe : « consolez, consolez mon peuple », je me suis rappelé le titre d’un livre d’un écrivain suédois qui s’est donné la mort à l’âge de 34 ans. « Notre besoin de consolation est impossible à rassasier ». C’est vrai, il y a en chacun une sorte de soif puissante, une intense aspiration que rien ne parvient à combler. Sommes-nous faits pour l’infini ? On peut certes trouver que c’est surtout un narcissisme béant qui parle là : « Et moi, et moi ». Si l’on est ainsi inconsolable, on peut chercher la consolation partout, mais voilà, notre attente paraît si démesurée qu’elle demeure comme muette et frappée de stupeur. Et en même temps, cela fait aussi partie de l’expérience : il est impossible de vivre sans promesse et sans espérance. Une vie sans promesse est une vie qui ne vaut pas la peine d’être vécue. La Bible raconte cela en long et en large non seulement sur le versant positif ; elle raconte comment Dieu, par-delà les échecs et les brisures de l’existence, insinue de la promesse afin que le désespoir n’étrangle pas les gens. Et sur le versant négatif, elle raconte aussi les doutes, les désespoirs des humains devant l’histoire telle qu’elle est : où est Dieu, où est leur Dieu, répètent les psaumes. « À quoi me sert toute cette vie juste ? », crie Job. Nous allons à la Bible pour entendre l’obstination d’une promesse, pour écouter des paroles de promesse, pour y puiser le courage d’exister.
Lorsque Jean-Baptiste nous dit qu’il attend celui qui « vous baptisera dans l’Esprit saint et le feu » nous tendons l’oreille en attente d’une réponse à ce qui nous questionne et nous travaille intérieurement : y a-t-il une bonne nouvelle quelque part ? Ce que nous attendons n’est pas simplement un message religieux ou un programme de mieux-être, c’est l’Esprit saint comme source en nous de la vie neuve, qui maintienne nos existences allumées pour aller parmi les obscurités du monde.
Que faire pour cela ? Nous nous tenons à l’écoute, dans l’écoute. Parmi les multiples voix du monde, dans cette vaste mer, cette vaste rumeur de paroles et d’informations, dans cette immense toile des réseaux sociaux, il s’agirait de discerner la promesse de Dieu, d’entendre ce qu’elle dit : « Tu es mon Fils bien-aimé, j’ai ma joie en toi ». C’est une voix qui cherche à faire sa place, à se faire entendre. Parmi toutes les rumeurs, c’est la rumeur de Dieu. Cette voix, elle a pour symbole la colombe. La colombe est le symbole de la promesse, elle annonce un nouveau commencement. Rappelons-nous Noé pris dans le déluge et qui envoie une colombe pour voir ce qu’il en est et elle rapporte d’abord une branche d’olivier et Noé comprend que la vie peut repartir et que la paix peut revenir. Nous sommes tous des Noé. Depuis l’arche du monde, nous lâchons des colombes en espérant qu’elles nous reviennent avec un rameau d’olivier dans le bec.
Mais on ne doit pas oublier que c’est en entrant dans le Jourdain, en entrant dans la rivière où Jean baptise, la rivière des pécheurs, que Jésus recueille la voix du Père. C’est en plongeant nos obscurités, nos blessures, nos fautes dans le Jourdain, c’est en les tournant vers la lumière de Dieu que nous pouvons trouver de la promesse et de la consolation.
Fr. Hubert Thomas
Lectures de la messe :
Is 40, 1-5.9-11
Ps 103 (104), 1c-3a, 3bc-4, 24-25, 27-28, 29-30
Tt 2, 11-14 ; 3, 4-7
Lc 3, 15-16.21-22