La question de Pierre dans l’Évangile a un goût de « qui perd gagne ». Laisser tout pour te suivre, oui ; mais qu’allons-nous y gagner ? Une place, de la reconnaissance, du succès, de la sécurité… ?

Non, rien de tout cela, mais un trône, nous dit le texte. Du pouvoir alors, cela peut être intéressant. Eh bien non, il ne s’agit pas non plus de dominer, mais bien de juger, c’est-à-dire de discerner en concertation avec d’autres pour chercher le bien commun. On se demande parfois pourquoi il y a tant de réunions dans la vie monastique, dans l’Église ; peut-être tout simplement parce que Jésus nous demande d’être solidaires dans un travail responsable. Jésus nous promet aussi les liens familiaux quittés, rendus au centuple. Cadeau d’un immense espace de relations, qui pourrait inquiéter quelque peu aussi quand on sait les épreuves et les difficultés que traversent souvent les familles. Rien de tranquille, mais à travers cette réalité de disciple nous est révélé le souci sincère pour l’autre traduisant un dévouement gracieux qu’on appelle parfois, l’amour, la charité.

Et au bout de ce parcours, nous recevons la Vie éternelle, c’est-à-dire Dieu lui-même. Saint Paul le disait avec justesse dans la seconde lecture: Oui, il y a des ennuis, des combats et des souffrances, mais c’est pour la Vie éternelle dans le Christ. Cela vient de Dieu et cela va à Dieu.

Saint Benoît dans sa règle dit que la prière communautaire doit toujours être brève; peut-être pensait-il aux homélies également. En général, les bénédictins aiment la liturgie, le partage de la louange, mais Benoît sait qu’elle n’est pas le but ultime.

Pourquoi chantons-nous l’office plusieurs fois par jour ? Nos pères avaient les idées claires à ce sujet: la psalmodie est un exercice qui nous aide à déposer devant Dieu la valeur de notre travail, le fruit de nos réunions, les soucis liés à nos combats, pour entrer petit à petit dans la perception consciente de la Vie de Dieu en nous, dans le goût de sa Présence: la joie d’aimer Dieu et de se laisser aimer par Lui.
Être de plus en plus animés par l’amour de la Vie qui nous relie les uns aux autres avec Dieu dans une liberté joyeuse, voilà la part et le but de tout homme de bonne volonté qui s’ouvre à la Source par l’écoute.

C’était aussi le bonheur de saint Benoît.
Brièveté de la prière, éternité de la Joie.

Fr. Renaud Thon

Lectures de la messe
Pr 2,1-9
Ps 33 (34), 2-3, 4-5, 6-7, 8-9, 10-11
Mt 19, 27-29

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