Le baptême de Jésus n’a pas le même sens que celui que nous donnons à notre propre baptême. En effet, contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce n’est pas les eaux du baptême qui ont purifié Jésus, c’est Jésus qui en recevant le baptême de Jean a renouvelé les eaux, les a purifiées. Que représentent alors les eaux du baptême ?
Le Christ en descendant dans les eaux symbolise l’humanité entière qui s’enfonce dans les eaux de la souffrance et les ténèbres de la mort, spécialement dans la mort du péché. Et la remontée du Christ vainqueur des puissances du mal est la renaissance de l’humanité à la vie nouvelle et à l’Esprit de Dieu. Ce mouvement de descente et de remontée est typiquement pascal, la descente évoque la mort et la remontée la résurrection. Le baptême préfigure déjà le mystère Pascal du Christ.
Revenons un instant à la personne de Jésus. Jésus a reçu le baptême à l’âge de 30 ans, un âge qui inaugure sa vie publique car n’est-ce pas à partir de son baptême qu’il commence à voyager pour porter la parole de Dieu aux femmes et aux hommes de son temps ? Par son baptême, Jésus sort de l’anonymat qui entourait son enfance, il consacre également la distance qu’il avait déjà prise avec sa famille proche, rappelez-vous la rencontre qu’il avait eue dans le temple alors que ses parents s’inquiétaient de ne plus le voir … Aujourd’hui, Jésus prend conscience du sort qui l’attend à la croix et assume pleinement sa condition de Fils de Dieu. Il s’engage donc en répondant, avec sa vie entière et en toute liberté, à l’appel de son Père. Le jour de son baptême, Jésus est ainsi confirmé par Dieu comme sauveur – roi et messie.
On comprend alors mieux pourquoi l’Église orientale préfère voir dans le baptême du Christ la véritable épiphanie du Seigneur, plutôt que dans l’adoration des mages comme l’église latine. Pour les orientaux, le Christ, au jour de son baptême atteint l’âge adulte, la pleine maturité de sa vocation.
En conséquence, atteindre l’âge adulte signifierait le moment précis où l’on assume pleinement la vocation pour laquelle on est appelé. Ne sommes-nous pas tous inscrits dans cette même dynamique? Chacun a dans l’Église une mission particulière que nous découvrons petit à petit au fil de l’existence. S’engager dans le mariage, dans la vie religieuse ou dans un autre état de vie, témoigne déjà d’une maturité certaine, mais il me semble que la pleine maturité dépendra bien plus de notre manière d’appréhender les conséquences de l’engagement quel qu’il soit: je pense à la naissance des enfants, leur éducation, aux difficultés de la vie en général – familiale, professionnelle, aux responsabilités diverses, aux décisions à prendre et bien sûr aux souffrances à vivre. D’ailleurs ne parlons-nous pas dans ces cas-là d’un véritable baptême du feu ? Être adulte c’est d’abord avoir une certaine lucidité et humilité sur soi-même afin de reconnaître ses capacités et ses limites.
L’âge adulte nous met donc devant nos responsabilités. Des enfants nous entourent, des frères ou des sœurs sont engagés avec moi sur la même route, je ne peux plus faire marche arrière, je dois assumer et rendre fécond mes choix. Être adulte dans le Christ c’est aussi s’ouvrir à l’inconnu de notre vocation propre qui ne sera peut-être pas exprimée dans un engagement précis mais que Dieu seul pourra reconnaître et aimer. Car il connaît les secrets des cœurs et la vérité de notre fo
Dans de telles conditions, le Baptême du Seigneur est un encouragement de première importance. Il me montre la route de la vie, en étant lui-même la vie. Cette vie renouvelle toute mort, enlève le péché et sanctifie toute femme et tout homme dans l’option qu’ils ont donnée à leur vie et qu’ils assument en adulte, librement. Par le baptême du Christ, Dieu nous révèle que nous ne sommes pas seuls sur le chemin, mais qu’il est avec nous, par son Esprit, tous les jours et dans toutes les situations.
Fr. Pierre Gabriel
Lectures de la messe :
Is 40, 1-5.9-11
Ps 103 (104), 1c-3a, 3bc-4, 24-25, 27-28, 29-30
Tt 2, 11-14 ; 3, 4-7
Lc 3, 15-16.21-22