Nous arrivons doucement à la fin du carême. Pâques pointe discrètement. La première lecture nous a parlé d’un monde nouveau. Le psaume est un éclat de joie. Mais, pour arriver à Pâques, il nous faut encore accompagner Jésus dans les jours les plus sombres de sa vie.
Le prophète Isaïe, dans la première lecture, évoque un monde nouveau qui germe déjà. Avez-vous remarqué à quel point l’année liturgique est en accord avec la nature ? Dans notre cas, c’est le printemps qui bourgeonne, qui est là partout –bien sûr, dans l’hémisphère nord-. Isaïe exhorte le peuple pour qu’il se prépare à partir, à revenir à Sion en sortant de Babylone. Aujourd’hui, Isaïe nous exhorte à sortir de nous-mêmes, de nos Egypte, nos Babylone, tous les deux lieux d’esclavage et de servitude : l’hiver est derrière nous.
Une nouvelle Alliance nous est proposée, qui est en germe. Il faut revenir à Dieu car de nouvelles routes s’ouvrent dans les terres arides. Des fleuves la traverseront. Le psaume va plus loin : c’est de joie qu’il nous parle : « Quelle merveille fit pour nous le Seigneur. Nous étions en grande joie. Qui sème dans les larmes moissonne en chantant ». L’apôtre Paul, dans sa lettre aux philippiens, nous demande d’oublier ce qui est en arrière, c’est-à-dire de ne pas réactualiser le passé, et d’aller donc toujours vers l’avenir. Paul parle de sa propre expérience, car Jésus l’attendait sur le chemin de Damas.
Dans notre évangile, il faut faire attention au début du texte : « le soir, Jésus s’en alla au mont des oliviers. De bon matin, il retourna au temple pour y enseigner ». Le mont Sion nous fait penser aux derniers jours de sa vie terrestre, et plus loin, au roi David, qui, par le mont des Oliviers, fuit son fils Absalom qui cherche à le faire mourir pour monter sur le trône à sa place.
Alors les scribes et les pharisiens amènent une femme accusée d’adultère. Une question qu’on se pose : L’homme adultère, où est-il ? Situation d’hier, situation d’aujourd’hui. Car, dans certains pays, la mort par lapidation est encore d’application. L’évangile ne parle pas de jugement. Ici, ce qui menace la femme, c’est un lynchage, en fait. Les scribes et les pharisiens posent à Jésus une question : « Dans la loi, Moïse nous a ordonné de lapider ces femmes-là. Qu’est-ce que tu en dis ? » en oubliant que le Lévitique parle, quant à lui, de jugement préalable, précisément… Mais le piège pour Jésus est là. S’il n’est pas d’accord, il est contre la loi de Moïse. S’il est d’accord, il est en contradiction avec son propre enseignement, la loi de la miséricorde, comme le dit dans l’Ecriture le prophète Michée : « C’est la miséricorde que je veux, et non le sacrifice. » Signalons, entre parenthèses, que la pensée rabbinique considère toutefois qu’un tribunal qui exprime une seule sentence de mort une seule fois tous les septante ans, est déjà un tribunal assassin et criminel. Qui sont donc eux qui mettent Jésus à l’épreuve ?…
Jésus s’abaisse et, du doigt, il écrit sur le sol, nous dit le texte. En se mettant par terre, à genoux, Jésus se met à la même hauteur que la femme. Il écrivait… quoi ? Nous ne le saurons jamais. Jésus exprime, avec son silence, un geste non verbal. Donc, il ne se prononce ni pour ni contre. En se redressant, il pose une question aux hommes : « Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il jette la première pierre ». En d’autres termes, il renvoie le bourreau à ses propres fautes. Il s’éloignent tous, en commençant par les plus âgés. Jésus et la femme restent là. « Où sont-ils donc ? Personne ne t’a condamnée ? » La femme répète : « Personne, Seigneur. » « Va et désormais, ne pèche plus » C’est une parole adressée à chacun de nous, en particulier en ce temps de carême. La Bible nous offre une longue liste de pécheurs pardonnés. En voici quelques uns : saint Pierre, qui avait renié Jésus trois fois ; saint Paul, persécuteur de chrétiens ; Matthieu, un collecteur d’impôts, c’est-à-dire un publicain ; Zachée, lui aussi publicain, chez qui Jésus s’invite ; sans oublier le bon larron au Golgotha. La miséricorde est à l’œuvre.
Dimanche prochain, c’est le dimanche des rameaux. Il nous reste donc quelques jours encore pour terminer le temps de carême. Demandons au Seigneur la grâce de la conversion. Elle nous est offerte gratuitement. Redressons nos chemins de vie. Retournons au Seigneur. Le Père miséricordieux nous attend.
Fr. Manuel Akamine
Lectures de la messe :
Is 43, 16-21
Ps 125 (126), 1-2ab, 2cd-3, 4-5, 6
Ph 3, 8-14
Jn 8, 1-11